mardi 24 novembre 2009

JOUR DE DEUIL POUR LES JOURNALISTES


J'aurais beaucoup aimé ne jamais avoir à écrire ce post. Ce message sera noir. Noir comme le deuil qui a envahi toute la communauté des journalistes des Philippines depuis hier, et par-delà l'archipel, les journalistes du monde entier. Noir comme la colère qui m'habite aujourd'hui.

Hier, lundi 23 novembre, un convoi mené par une équipe de campagne a été pris en embuscade par un groupe de près de 100 hommes armés, dans la province de Maguindanao, à l'ouest de l'île de Mindanao. Le convoi partait déposer la candidature d'un élu local, membre du clan des Mangudadatu, pour le poste de gouverneur de Maguindanao. Quelques heures après, des dizaines de corps ont été retrouvés sans vie, certains mutilés. 46 corps ont été retrouvées. Dont ceux de 12 journalistes, qui accompagnaient le convoi.

Ce massacre sanglant porte un nom aux Philippines : Rido. A Mindanao, un Rido est une guerre de clan entre deux familles musulmanes, qui surgit pour des raisons d'honneur, de litiges de terres, ou comme dans ce cas, un affrontement pour la domination politique. Les Ampatuan tiennent toute la province de Maguindanao, et même une partie de la région, sans partage depuis près de 10 ans. Une vingtaine de membres de la famille sont élus à différents postes locaux, et la plupart d'entre eux le sont sans jamais rencontrer d'opposition lors des scrutins. Chacun sait que se présenter contre les Ampatuan est un gage sur sa vie. Et c'est ce qu'a pourtant fait le clan des Mangudadatu, en se présentant contre eux pour les élections de 2010.

La grande différence, ce qui soulève l'indignation nationale dans l'archipel, est que ce massacre a dépassé les règles du Rido. Jamais des membres hors des clans n'avaient été volontairement touchés dans des Rido. Et dans ce cas, même les journalistes ont été sauvagement assassinés. Reporters Sans Frontières a qualifié ce jour comme le plus tragique de l'histoire moderne : "Jamais dans l’histoire du journalisme, la profession n’avait payé un aussi lourd tribut en une seule journée", déclare solennellement RSF sur son site.

Ce qui révolte encore plus, c'est de voir à quel point la barbarie se mêle à l'impunité dans ce Far West philippin. Les Ampatuan sont un clan de guerriers, qui détient une milice de centaines d'hommes armés, et protégés par le gouvernement national, qui s'en sert pour "protéger" ses votes. En 2004 et 2007, les Ampatuan ont assuré au camp de Gloria Arroyo une victoire complète dans sa province. La tricherie a été tellement massive que dans certaines villes, pas un vote n'a été comptabilisé pour l'opposition, alors que celle-ci remportait dans toutes les autres provinces, ou presque.

La question qui se pose aujourd'hui, c'est qu'est ce que fera Gloria Arroyo avec cet allié barbare ? On craint qu'à la veille d'élections nationales aussi sensibles que celles de mai prochain, le clan Ampatuan ne s'en sorte trop bien. Et les victimes ne soient abandonnées à la loi révoltante du plus fort, dans ce climat d'injustice et d'impunité.


Pour approfondir le sujet, voici de nombreux liens

Explications, à vif, sur RFI

Article d'analyse dans Le Temps de Genève

L'empreinte sanglante des milices privées, dans La Croix

Condamnation de RSF

Le clan des Ampatuan, les Parrains de Mindanao

Les dernières infos sur le massacre

PS, au 10 janvier : après plus d'un mois de fouilles, le décompte des victimes est de 57 personnes assassinées, dont 30 journalistes. 2 journalistes supplémentaires sont du reste toujours portés disparus, et pourraient se trouver dans le charnier.

mardi 10 novembre 2009

Femme philippine cherche mari étranger sur Internet



Elles sont amoureuses, mais n'ont jamais vu leur homme. Elles parlent avec lui depuis 3 ans et sont prêtes à se marier avec lui, mais ne l'ont jamais touché. Internet, aujourd'hui casse les frontières. Et ouvre les voies de l'Amérique à ces milliers de Philippines qui ont un rêve : celui de l'émigration.

Aujourd'hui, 100 000 Philippins - et surtout Philippines - sont enregistrés sur les sites de rencontres. Un chiffre énorme, qui en fait l'une des premières nationalités inscrites sur ces sites internationaux. L'espoir de ces Philippines, c'est de rencontrer un homme attentionné, doux et charmant, et surtout, d'avoir grâce à lui une vie confortable.

Attention, les Philippines ne sont pas pour autant vénales, et ne voient pas un étranger que comme un billet de banque. Mais la grande majorité d'entre elles viennent de la province, où elles vivent avec un niveau de vie assez pauvre. Mais elles rêvent d'autre chose, elle ont le Rêve américain. De ces villes de Davao, Dumaguete, ou Zamboanga, des millions partent chaque année pour travailler en Arabie Saoudite, au Canada ou aux Etats-Unis.

Mais une autre voie possible pour les femmes, aujourd'hui grâce à Internet : celle de trouver cette meilleure vie en rencontrant un étranger. L'amour se mêle facilement à ce rêve pour des filles particulièrement romantiques, et la barrière d'Internet ne les gêne pas trop en général. Elles restent fidèles à cet étranger avec qui elles parlent pendant des heures par jour, pendant des mois et des années, en attendant de vivre une nouvelle vie de rêve, là-bas, en Amérique.


Venez écouter le témoignage d'une de ces filles, mais aussi les risques que prennent ces Philippines en cherchant cette nouvelle vie, dans ce reportage diffusé sur RFI. , et surtout, plus long, donc plus intéressant, cet article paru dans La Croix
(Photo : en haut : réunion de "conseil" organisé par les autorités philippines pour les femmes philippines qui s'apprêtent à partir à l'étranger avec leur nouveau mari.
Ci-contre: Brenda, originaire d'une petite île de province, s'apprête à rejoindre son mari de 51 ans aux États-Unis)


Mais pour prolonger le sujet, j'aimerais également ouvrir la discussion aux autres acteurs de ces relations : les hommes. J'ai rencontré les filles philippines ici, il m'intéresse d'avoir les témoignages de ceux qui ont eu la chance de rencontrer ces filles, et ont pu mener à bout, ou pas, ces relations.

N'hésitez pas à laisser vos commentaires sur ce blog, ou si vous voulez rester plus discret, m'écrire sur mon e-mail : sebfarcis@yahoo.fr