mardi 5 octobre 2010

Les Philippines s'enflamment autour du planning familial



Le débat s'est de nouveau enflammé dans l'archipel philippin. Il n'aura fallu que quelques mots du Président, prononcés en terme choisis depuis l'autre bout du monde, à San Francisco. Une étincelle, à peine, et tout s'est emballé, soudainement.

Benigno Aquino s'exprimait devant des Philippins expatriés de San Francisco, quand une question lui a été posée sur sa positon à propos du planning familial. Benigno Aquino a répondu, de manière diplomatique " The government is obligated to inform everybody of their responsibilities and their choices ( of contraception ). At the end of the day, government might provide assistance to those who are without means if they want to employ a particular method," ("Le gouvernement a l'obligation d'informer chaque personne de ses choix en terme de contraception. Et le gouvernement pourrait ainsi aider ceux qui n'ont pas les moyens d'utiliser la méthode qu'ils désirent" ).

Cette déclaration semblerait a priori inoffensive et loin de toute polémique au sein de toute démocratie libérale séculière, et pour cet archipel philippin dont la constitution a été calquée sur celle des Etats-Unis, et qui s'enorgueillit d'avoir des moeurs politiques très libérales et féministes, en étant le premier pays d'Asie à avoir élu une femme à la tête du pays en 1986.

Libérales, oui, sauf quand il s'agit des questions familiales et sexuelles, où la position dominante est pour l'instant celle tenue par l'Eglise. Ainsi, non seulement l'avortement est totalement proscrit, mais l'accès aux contraceptifs est difficile, et surtout, non-financé par l'Etat. Car le clergé philippin considère encore les préservatifs ou la pilule comme des "méthodes abortives".

Un front vient donc de se constituer, avec d'un côté le clergé qui a menacé avec forme le Président d'"excommunication", et le gouvernement qui essaie de montrer la différence entre avortement et contraception. Au milieu, les médias ont fait la Une de leurs journaux sur ce conflit depuis 10 jours.

Le principal enjeu de cette guerre est le vote de la loi sur le financement du planning familial par l'Etat. Une loi qui a été débattue au Parlement depuis 15 ans, mais toujours opposée avec succès par le clergé.

En attendant, l'archipel continue à voir sa population exploser ; les Philippines comptent aujourd'hui 95 millions d'habitants pour un territoire deux fois moins grand que la France, et l'une des croissances démographiques les plus élevées d'Asie de l'Est, à 2% par an. En 1960, le pays comptait à peine 25 millions d'habitants (cf graphique).










Mais entre temps, les familles les plus pauvres n'ont reçu aucune formation ou aide financière pour contrôler la taille de leur famille, alors que ces foyers pauvres qui ont à peine assez d'argent pour manger, n'ont pas les moyens d'acheter un préservatif à 30 centimes d'euros. Ces familles des bidonvilles ont donc grandi, et de la pauvreté n'a fait que naître plus de pauvreté : les foyers pauvres ont en moyenne 5 enfants, contre 2 enfants dans les familles riches.

A présent, le nouveau Parlement s'apprête à rouvrir les débats et à s'exprimer sur une nouvelle proposition de loi sur le sujet. Ce débat auquel on assiste en ce moment n'est donc qu'un prélude.

Pour comprendre les enjeux de cette question du planning familial, voici quelques liens vers mon travail récent et ancien sur un sujet qui ne cesse de hanter cette société philippine :

- Un article de ce jour dans La Croix, à propos de la guerre entre Aquino et l'Eglise.

- Un documentaire sur les effets de l'interdiction des contraceptifs à Manille

- Un post publié à ce moment, avec le débat qui s'en est suivi dans les commentaires.

N'hésitez pas non plus à donner votre avis ou poster vos commentaires ci-dessous.

1 commentaire:

En vadrouille a dit…

"Mais entre temps, les familles les plus pauvres n'ont reçu aucune formation ou aide financière..." C'est vrai!!! Alors il faut leur donner les moyens pour s'éduquer et gagner la VIE et pas le contraire!!!